Le prince Wolsan (월산대군, 1455-1489) et le roi Seongjong(성종)


Enfin, une belle histoire d’amour fraternel entre deux princes ! Oui, elle existe. Il s’agit des deux fils de la reine-mère Insoo (
인수대비,1437-1504) que j’ai récemment présentée sur ce groupe : le roi Seongjong(성종, 1457-1495) et son grand frère, le prince Wolsan (월산대군, 1455-1489).

Si je pense que Insoo était une bonne mère, malgré tous ces clichés plus ou moins fictifs qui la décrivent comme ambitieuse et extrêmement sévère, c’est parce que ses fils devinrent, tous deux, intelligents, cultivés et dévoués à l’État et à leur famille.

Le premier est cité comme l’un des Messieurs les plus exemplaires et le second, comme l’un des plus grands roi de Joseon (1392-1910)

Retournons à la Cour du roi Séjo (세조, 1417-1468), leur grand-père, en 1457. Le dauphin Euigyeong, le mari d’Insoo et le père des deux princes, venait de décéder à l’âge de 19 ans. Les petits avaient respectivement 2 ans et 3 mois.

Vu le taux de mortalité infantile très élevé à l’époque, il parut plus raisonnable à Séjo de désigner son second fils, et non pas son premier petit-fils, comme nouveau prince héritier. Séjo, qui avait usurpé le trône de son jeune neveu, aurait eu également peur que son deuxième fils, pourtant alors âgé seulement de 7 ans, ne tuât ses petits-fils à l’avenir pour s’emparer de la couronne comme il avait fait.

Ainsi, l’ex-dauphine (Insoo) et ses enfants durent quitter le palais. Ils demeureront dans un hôtel particulier situé près du palais jusqu’en 1469.



D’après les archives royales, la veuve était tellement dure pour l’éducation de leurs enfants dès leurs plus jeunes âges que le roi Séjo et son épouse la surnommèrent « princesse tyrannique » et appelèrent souvent les deux princes au palais pour leur permettre de respirer un peu.

J’imagine les deux pauvres petits bouts obligés de travailler du matin au soir et d’apprendre les règles strictes de conduite de prince. Mais les deux oursons princiers suivirent l’instruction de sa mère sans mot dire pour plaire à leur petite maman.

Parce qu’au fond, ils durent sentir qu’elle les aimait profondément même si elle essayait de masquer sa tristesse et sa solitude sous le masque d’une mère sévère et exigeante. Situation difficile pour des enfants de leur âge…

Heureusement, ils étaient deux. Ils s’encouragèrent pour avancer dans leurs études tout en s’amusant et en discutant ensemble. Le grand se serait occupé comme un père du petit qui n’avait aucun souvenir de son papa.

Entre-temps, leur grand-père, le roi Séjo décéda en 1468. 14 mois plus tard, leur oncle, le roi Yéjong, lui emboîta le pas à l’âge de 19 ans. Comme le fils de ce dernier, âgé de 3 ans, était encore trop jeune, l’épouse du roi Séjo, la reine douairière Jeonghee (정희왕후, 1418-1483) désigna le second prince de Insoo, veuve du défunt dauphin Euigyeong, comme le prochain roi.

Le prince cadet devint alors le roi Seongjong.

Mais pourquoi un tel choix alors que le droit d’aînesse pour la succession du trône était le principe de base ? Parce que le cadet s’était marié avec une des filles du tout puissant premier ministre Han Myeong-hoe (한명회,1415-1487) . La reine Jeonghee aurait voulu assurer la stabilité de la succession du trône par cette alliance.

Cependant, le prince Wolsan ne prit aucun ombrage de cette décision qui eût pu lui paraître injuste. Il aimait tant sa famille, surtout sa maman et son frérot. Dès l’accession au trône de son petit frère, son Altesse fit donc tout pour assurer la réussite du règne de ce dernier, bien qu’il fût brillant tout autant, sinon davantage, que le nouveau roi.

Comme il avait été devant dans l’ordre de succession, il aurait très bien pu être tenté de monter un coup d’État. Loin d’y songer, il voulut jusqu’à épargner son frère de ce genre de soupçon.

Dans cette perspective, Monsieur s’abstint de se mêler des affaires d’État et s’isola volontiers du monde.

Au niveau de la conduite aussi, il resta vis-à-vis de lui-même très strict à l’instar de sa mère, la reine-mère Insoo. Il ne manqua pas de rendre au palais et saluer chaque matin les trois reines douairières, sa grande-mère, sa tante et sa mère, ainsi que le roi son frère lorsqu’il demeurait dans la capitale.

Malgré son rang très élevé, il se montra toujours modeste à la Cour, ce qui suscita une grande admiration à son égard de la part des aristocrates. Et lors des banquets royaux, le prince ne se laissa jamais aller jusqu’à l’ivresse malgré qu’il fût un grand amateur d’alcool.

Fidèle à sa femme, qualité fort rare chez les nobles riches et puissants de l’époque, il ne fréquenta point de gisaengs et ne prit aucune maîtresse jusqu’à ce que ses proches lui recommandèrent d’en prendre une pour assurer sa descendance comme le couple n’avait aucun enfant.

Loin du vacarme de ce monde, il aimait passer son temps à écrire des poésies à pêcher dans ses pavillons isolés ou à voyager dans le pays. Ses poèmes avaient une telle notoriété qu’ils furent célèbres même en Chine.

Mais ce qu’il aima avant tout était d’écrire des lettres et envoyer ses nouveaux poèmes à son royal frère, le roi Seongjong.

Il en était de même pour Seonjong, qui se sentait toujours redevable à l’égard de son frère comme c’est indépendamment de sa volonté qu’il accéda au trône. Ainsi, la chronique royale fait très souvent état de leurs échanges fréquents, des lettres et des cadeaux plein d’amour fraternel.

Seonjong conviait le prince Wolsan à tous les banquets royaux, le mettait tojours à la place d’honneur. Dès qu’il recevait des cadeaux somptueux de la part des émissaires étrangers ou autres, il ne pensait qu’à les partager avec son frère.

Lorsque son frère revenait à Séoul, il annulait des réunions avec ses ministres pour l’accueillir. Et lorsque son frère eut enfin un fils avec sa maîtresse, le roi fut si heureux qu’il lui accorda le statut d’enfant légitime.

Malheureusement, le prince Wolsan s’éteignit tôt, à l’âge de 34 ans, en 1489 suite à une maladie.

Le tombeau du prince Wolsan

Seonjong en fut inconsolable. Il refusa de manger pendant plusieurs jours, pleurant à chaudes larmes la mort de son grand frère. Il n’organisa aucune fête pendant les six mois suivants. Pour se consoler, il fit rédiger, entre autres, un recueil des poèmes de son frère. Ce recueil servira, ensuite, de manuel pour l’éducation de dauphins.

Cinq ans plus tard, en 1494, le roi rejoignit son grand frère dans l’éternité à l’âge de 36 ans…

Commentaires

  1. Histoire magnifique ! Merci Sojeong ! 😊

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  2. Bjr avez vous un film à conseiller sur fè roi merci

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  3. mazieremariechristine@gmail.com29 mars 2024 à 14:45

    Un grand merci à vous pour toutes ces histoires.j'apprecie énormément.

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