Le pape François et la Corée


Le pape François aima la Corée. 

Le décès du souverain pontife plongea les Coréens dans une grande tristesse quelle que soit leur religion, d’autant plus que Sa Sainteté n’hésita pas afficher son affection particulière pour notre pays. 


Déjà à l’époque où il était évêque en Argentine en 1993, il fut profondément impressionné par le pays du Matin clair. C’est que l’ordre des bonnes sœurs coréen, « La famille sainte des humbles servantes (성가소비녀회) », avaient envoyé ses sœurs-infirmières à un hôpital municipal argentin. A ce moment-là, cet établissement avait du mal à trouver des infirmières. Les sœurs coréennes arrivées sur place s’occupèrent des patients avec dévouement et gentillesse même si elles ne parlaient pas l’espagnol. Le pape François en fut tellement profondément touché qu’il écrivit à l’ordre coréen : « A travers ces sœurs coréennes, je peux sentir la grâce de Sainte-Vierge.» Fondé en 1943 par un prêtre coréen appartenant à la Mission étrangère de Paris, cet ordre a pour missions de s’occuper des malades, des handicapés, des pauvres et des sans-abris.

Une fois nommé au poste suprême de l’église catholique, il rencontra un missionnaire italien revenu de Corée. Sur le terrain, ce dernier avait souffert de dures épreuves. Lorsque le pape lui demanda comment il put les surmonter, il répondit que c’était grâce à l’évêque Lazare Yoo Heung-sik du diocèse de Daejeon. En 2014, à l’occasion de sa visite en Corée, le défunt pape put rencontrer ce dernier. Il le regarda attentivement avant de lui proposer de venir au Saint-Siège en tant que ministre des ecclésiastiques.  Foudroyé par cette proposition inattendue, monseigneur Yoo refusa : « Mais je ne parle pas plusieurs langues !  En plus, je ne suis qu’un petit évêque en province d’un pays qui se trouve au bout du monde. Par ailleurs, je n’ai jamais travaillé au Vatican. On a besoin quelqu’un qui a un grand cœur comme vous pour ce poste.» « Bah, vous parlez bien l’anglais et l’italien, répondit l’Evêque de Rome, ça suffit. Puis, vous apprendrez sur place comment fonctionne le Saint-Siège. » Ainsi, Mgr Yoo devint le premier Coréen à occuper un poste clé au Vatican. L’année suivante, le pape François le nomma cardinal. Agé de 74 ans, il fut évoqué comme l’un des 12 candidats favoris pour le successeur de François selon l’un des plus grands journaux italiens, le Corriere Della Sera. 

C’est également ce dernier qui avait activement persuadé le Vicaire de Jésus de venir en Corée en août 2014, en lui envoyant des lettres, même si avant, ils ne s’étaient pas rencontrés. C’était seulement un an après la nomination de François au poste de pape. C’est le troisième pays du monde et le premier Etat en Asie qu’il visita. 

Le pape François devint ainsi le deuxième souverain pontife à venir en Corée après Jean-Paul II qui effectua deux déplacements dans le pays en 1984 et en 1989. Soit dit en passant, Jean-Paul II se rendit à Gwangju où eut lieu le mouvement démocratique de mai  1981. Des milliers de manifestants furent tués par l’armée. Dans son homélie prononcée lors d’une messe célébrée dans cette ville, il consola sincèrement les familles des victimes. En 1989, il sanctifiat103 martyrs coréens et français exécutés au 19e siècle. 

De son côté, lors de son séjour de cinq jours en Corée, le pape François rencontra des gens en difficulté comme des handicapés et des pauvres. A l’époque, le pays entier restait dans le choc car un ferry dans lequel étaient embarqué des lycéens fit naufrage en avril en faisant environ 300 morts et disparus. Cet accident demeure encore aujourd’hui un traumatisme national. Le Saint Père rencontra quatre fois les familles des victimes tout au long de son séjour et baptisa le père d’une lycéenne tuée lors de cette catastrophe. Il garda le ruban jaune durant sa visite. Il signifie « ne jamais oublier » le naufrage du bateau. Or, à ce moment-là, le gouvernement de Park Geun-hyé était vivement critiqué par ses réactions tardives au moment du naufrage. Ainsi, l’un des proches de François lui conseilla de ne pas le porter trop souvent pendant son voyage en Corée pour la neutralité politique.  Alors, il répondit : « Devant les hommes qui souffrent (de la douleur), il ne peut pas y avoir de neutralité politique.

Puis Sa Sainteté invita les rescapées de l’esclavage sexuel perpétré par l’armée nipponne pendant la Seconde guerre mondiale à une messe célébrée à la cathédrale de Myeongdong (cathédrale de l’archidiocèse de Séoul). Elles purent s’assoir  au premier rang. Après la messe, le pape François les rencontra et leur offrit des chapelets blancs. Non seulement ces anciennes femmes de réconfort mais aussi d’autres réprimés et faibles de la société furent invités à la messen, mais également des défenseurs des droits de l’homme, des ouvriers licenciés injustement, des réfugiés nord-coréens, etc. 

Le pape profita de son séjour en Corée afin de béatifier 124 martyrs coréens à la place de Gwanghwamun. Des dizaines de milliers de personnes furent réunis pour assister à cette cérémonie comme vous le voyez dans l’une des photos.

Sur le plan diplomatique aussi, il eut des échanges actifs avec des chefs d’Etat coréens. Il rencontra une fois la présidente de l’époque Park Geun-hyé lors de son déplacement dans le pays. Le président Moon Jae-in, catholique fervent, se rendit deux fois au Saint-Siège. A ces occasions, l’Evêque de Rome célébra les messes destinées à prier pour la réunification des deux Corées. 


En effet, le souverain pontife manifesta souvent son souhait de voir les  Corées se réunifier. Et il déplora les conditions de vie extrêmes dont souffrent les nord-Coréen sous la dictature de la famille Kim. D’ailleurs, il essaya de visiter la Corée du Nord mais en vain. Il avait également promis de revenir en Corée en 2027 mais il partit trop tôt. 

Suite au décès du pape François, les médias continuent de publier, à l’envi des articles sur sa vie ou sur ses relations avec la Corée. Une chapelle ardente fut installée à la cathédrale de Myeongdong et les visiteurs forment une longue file avant de se recueillir devant le portrait de Sa Sainteté. L’archevêque de Séoul célèbrera une messe, demain, à cette cathédrale, une messe en hommage du défunt. 

Paix à son âme…

Pour l’histoire du catholicisme en Corée :
https://ours15.blogspot.com/2025/02/lhistoire-du-catholicisme-en-coree.html

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