L'histoire de l'adoption internationale de la Corée du Sud



Au commencement fut la guerre. Le conflit fratricide (1950-1953) qui réduisit en cendre toute la péninsule. « 100000 orphelins de guerre, tu t’imagines ! », interrogée sur cette question, maman expliqua. « Je vivais à Séoul, l’endroit le plus durement frappé par la guerre. Dans ma classe, il y avait beaucoup d’orphelins ! Les journaux mettaient tous les jours des photos de ces derniers pour trouver leurs parents. Cette campagne ne marcha pas mal. Il n’empêche qu’il restait encore beaucoup d’enfants dans des orphelinats. Faute de pouvoir les entretenir correctement, car trop pauvre, le gouvernement décida alors d’envoyer une partie d’entre eux à l’étranger. »

« Ceux qui furent choisis pour les adoptions internationales pouvaient bénéficier des traitements privilégiés : ils étaient bien nourris et gâtés avec tous les bonbons et chocolats provenant des USA et d’autres pays développés. Alors que, tu vois, à l’époque, la misère noire sévissait partout et on était heureux de trouver un porridge de riz dans lequel flottaient des vers de riz. Il faut également expliquer à tes amis que beaucoup d’entre eux étaient des enfants métissés. Il y avait beaucoup de soldats des Etats-Unis et d’autres pays occidentaux qui participèrent à la guerre. Et forcément, ça laisse la trace… Certaines mères de ces enfants se livrèrent à ce commerce ‘volontiers’ pour nourri sa famille, d’autres, non. Tu vois ce que je veux dire. Et à l’époque, vivre en Corée avec une physique différente était très très dur. »

Les associations qui furent chargées de cette mission, dont celle de monsieur Holt, embauchèrent des jeunes femmes pour s’occuper des enfants. Dans ma classe, il y avait une copine dont la sœur travaillait dans ces organes. D’après elle, sa sœur était bien payée et elle apportait des sucreries que les enfants dont elle s’occupait avaient laissées. Voilà mon souvenir lié à cette histoire. Pour la suite, tu feras la recherche sur Internet.»

En effet, on divise en trois périodes l’histoire de l’adoption internationale. La première période concerne les orphelins de guerre qui eut lieu entre 1950 et 1960. Le gouvernement approuva officiellement les adoptions des orphelins de guerre en 1954 en adoptant un décret présidentiel visant à mettre en place des organes chargés de cette mission. Le problème, c’est que le tout jeune gouvernement, créé en 1948 et dévasté ensuite par le conflit, n’avait pas en tête d’instaurer des règlements plus stricts destinés à protéger les droits de ces enfants adoptés. Le plus urgent, c’était de réduire le nombre des bouches à nourrir, comme on dit en Corée. 

Or, en 1964, le gouvernement autoritaire de Park Jung-hee adopta la loi spéciale sur les adoptions des orphelins, afin de promouvoir les adoptions internationales même si les orphelins de guerre étaient un peu trop âgés (au moins 11 ans) pour l’adoption. Ainsi débuta la 2e vague de l’adoption internationale qui durera jusqu’en 1998.

A cette période, le pays se mit à apercevoir la fin du long tunnel de la misère dont il souffrait depuis le 19e siècle grâce au plan de développement économique de Park. Pourtant, la pauvreté était encore présente et certains parents étaient amenés à abandonner leurs enfants pour leur garantir un meilleur avenir. « Oui, voilà, intervint maman lorsque je lui ai raconté les grandes lignes de mon post, il faut que tu précises qu’à l’époque, surtout dans les années 1960 et au début des années 1970, on n’avait peu accès aux moyens de contraception. On faisait des enfants comme ça venait. Et encore beaucoup de famille n’avaient pas de moyens de les nourrir et éduquer correctement ! Même aujourd’hui, si on a six ou sept enfants comme c’était courant à l’époque, ce sera difficile de rejoindre les deux bouts. »

Le problème, c’est que les associations qui s’occupaient des adoptions n’envoyaient pas que ces bébés officiellement confiés par leurs familles. Ils expédiaient aussi des enfants perdus confiés temporairement et parfois, ils allaient même jusqu’à en kidnapper. L’histoire de Laurie Bender, l’enfant adoptée aux Etats-Unis, en témoigne. Elle fut enlevée en mai 1975 devant sa maison pendant que sa mère faisait des courses. Désespérée, cette dernière déploya tous les efforts pour retrouver sa fille mais en vain. Heureusement la mère et la fille purent se retrouver grâce à l’association 325Kamra qui effectue des tests ADN pour les enfants adoptés. 

Pourquoi une telle atrocité de la part de ces associations ? Et comment expliquer la complicité flagrante de l’Etat qui ferma les yeux devant de telles pratiques illégales ? C’est que les adoptions étaient une industrie juteuse qui leur permettaient d’empocher des commissions conséquentes et, pour le pays, des devises étrangères. Par conséquent, dans les années 1960 et 1970, les bébés adoptés figuraient parmi « les produits d’exportation phares » du pays. Quelle honte !! 

Chun Doo-hwan qui succéda Park Jung-hee assassiné en octobre 1979 lors des deux coups d’Etat poursuivit avec encore plus de zèle cette « politique ». Ainsi le nombre des enfants adoptés dans les années 1980 grimpa jusqu’à 65111. 

Après la démocratisation du pays en 1987, ce chiffre se mit à reculer mais il resta toujours à un niveau élevé jusqu’au début des années 2000, environ 2000 à 3000 enfants par an. Les choses commencèrent enfin à bouger depuis l’arrivée au pouvoir du premier président du camp progressiste (actuel DP auquel appartient le nouveau président Lee Jae-myeong), Kim Dae-jung en 1998. Il présenta ses excuses officielles dans une réunion des adoptés à l’étranger : « Nous avons commis une véritable atrocité. Je me sens lourdement responsable de ne pas avoir pu vous faire grandir dans le pays où vous êtes nés. En tant que président de la République, je vous présente mes excuses sincères. » Il s’agissait de la première excuse formulée par un chef de l’Etat. En ce faisant, le président Kim signa la troisième période de l’adoption internationale dans laquelle on put assister une baisse significative des enfants adoptés. 

Soit dit en passant, ce qui caractérise les enfants adoptés dans les années '90 et 2000, c’est que la plupart d’entre eux avaient été confiés par des mères célibataires non mariées. Les mœurs avaient changé et les jeunes n’hésitaient plus « à franchir la ligne rouge » avant le mariage. Or, les mentalités n’ont pas changé et ces jeunes mères sont considérées encore comme ce que vous devinez. Le manque d’éducation en la matière exposait également au danger des grossesses non voulues. Et bien que le pays soit devenu plus riche, les couples coréens demeurent réticents à l’adoption des enfants. Car le confucianisme accorde une grande importance au lien de sang et aux ancêtres. Ainsi, il est plus difficile pour les Coréens d’adopter « des enfants dont on ne peut pas savoir l’origine » 

Le président Roh Mu-hyeon, appartenant au camp de centre-gauche comme son prédécesseur, mis en place des mesures encore plus concrètes afin d’endiguer ce fléau. Ainsi, le nombre des enfants adoptés recula considérablement pendant son mandat, de 1899 en 2006 À 1125 en 2009. Les présidents qui lui succédèrent lui emboîtèrent le pas quel que soit leur orientation politique, même le président destitué Yoon Suk-yeol. Plusieurs lois et décrets visant à rendre plus strictes et transparents le processus d’adoption internationale furent mis en place. Grâce à ces efforts, le nombre d’enfants adoptés ne cessa pas de baisser. En 2007, le nombre des adoptés en Corée dépassa, pour la première fois, celui des adoptés à l’étranger. Cette tendance se poursuit jusqu’à présent. Et en 2023, ce chiffre est tombé sous la barre des cents : 79. Enfin en 2024, 58 enfants seulement furent envoyés à l’étranger contre 154 adoptés dans le pays. 

Le gouvernement mène, en parallèle, différents projets visant à aider les adoptés à mieux comprendre leur pays natal à travers des cours de coréen et de culture coréenne, des programmes de visite, etc. S’occuper de ces derniers est l’une des missions importantes des missions diplomatiques dans des pays où ils sont nombreux comme la Belgique ou la France. Enfin, ils peuvent demander la nationalité coréenne tout en gardant leur nationalité alors que la double nationalité est normalement interdite en raison du service militaire.

Et l’organe gouvernemental créé pour aider les enfants adoptés proposent plusieurs servies et informations : https://www.kadoption.or.kr/en/ Parmi eux figure notamment le test ADN pour aider ces derniers qui n’ont pu trouver aucune information sur leurs parents biologiques : 
https://www.kadoption.or.kr/en/info/dna_test.jsp

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